Les ONG dans la crise des migrants
Depuis 2014, des ONG ont installé des stations opérationnelles à Malte et en Sicile. Leurs navires patrouillent au plus près des côtes libyennes afin de porter secours à des embarcations transportant des migrants d’Afrique subsaharienne ou du Proche-Orient. Certaines de ces ONG, une majorité, ont été créées dans le contexte de « la crise des migrants », souvent à la suite d’un épisode médiatique émotionnel. D’autres sont des acteurs classiques de l’aide humanitaire dans le monde. Toutes partagent, à quelques différences de degré dans leur expression, une même vision de la question migratoire.
Qui sont ces ONG ? Qui les dirige ? Quelles sont les motivations de leurs fondateurs ? Comment sont-elles financées ? Quel est leur bilan en termes de secours ? Ont-elles des liens avec des organisations politiques ? Quel regard portent-elles sur le rôle de l’Union Européenne dans ce dossier ? Sont-elles vraiment, pour certaines, en lien avec les passeurs ? Au final, leur présence crée-t-elle cet afflux de réfugiés, à tout le moins l’augmente-t-elle ? Seule une réponse à chacune de ces questions permet d’avoir une connaissance exacte de ce qui représente la part la plus importante des actuelles migrations trans-méditerranéennes.
Avec plusieurs milliers de départs sur le premier trimestre 2018, celles-ci, malgré une baisse hivernale, n’ont pas cessé. Certaines ONG parlent même d’une augmentation avec le printemps.
Les ONG créées depuis 2014 sont majoritairement originaires d’Europe du Nord : quatre allemandes, une franco-allemande, une néerlandaise. À leurs côtés, on trouve deux organisations espagnoles et l’initiative très singulière d’un riche homme d’affaires italo-américain installé à Malte. Cette sur-représentation allemande correspond sans nul doute à la place centrale de ce pays dans l’accueil des réfugiés et à la communication très forte qui s’en est suivie afin de faciliter cet accueil de population. Le cas espagnol est, nous le verrons, d’un autre ordre. Il répond sans doute pour bonne part aux profils particuliers et aux objectifs personnels de leurs fondateurs.
Les ONG abusent du cadre légal du droit maritime (notamment la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982) qui fait obligation morale et légale à un navire de se dérouter pour porter assistance à des personnes en détresse. Elles agissent sur mandat du MRCC (Maritime Rescue Coordination Center) de Rome.
À l’été 2017, l’État italien, soutenu par l’Union Européenne, a suspendu le droit pour les ONG de continuer leurs opérations de sauvetage à leur signature d’un Code de conduite. La plupart des ONG ont fini par le signer (ce qui n’a pas empêché l’une d’entre elles de voir son navire saisi au printemps 2018 sans qu’une violation formelle dudit Code ne soit prouvée).
Il est impossible d’avoir une certitude sur le bilan cumulé de l’activité des ONG. Il semble cependant qu’en environ trois ans et demi, celles-ci auront recueilli environ 200 000 personnes, dont 92 000 depuis début 2016. Il existe de fortes disparités entre les bilans de chacune, entre, par exemple, Sea Watch et ses 35 000 rescapés, et les 549 de Mission Lifeline.
Il est possible que certaines ONG aient parfois gonflé leurs bilans dans un but de communication. Il est vraisemblable également que des migrants ayant été transbordés d’un navire à l’autre avant de gagner l’Europe aient pu être comptés deux fois. Enfin, lorsque deux ONG travaillent ensemble sur le même navire, leurs bilans sont publiés séparément mais peuvent être par mégarde additionnés.
Quoi qu’il en soit, le nombre de personnes recueillies est important. Important mais, cependant, il ne représente qu’une minorité des sauvetages de migrants dans la zone.
Selon des données des garde-côtes italiens citées par SOS-Méditerranée dans son rapport annuel paru en 2018, les ONG ont assuré 26 % des sauvetages en 2016 et 41 % en 2017. Les autres sauvetages (74 % en 2016 et 59 % en 2017) sont opérés par les garde-côtes italiens, les navires marchands, les marines européennes, les navires engagés dans l’opération FRONTEX…
C’est donc la forte médiatisation générée par les ONG qui peut faire croire au public européen que, sans elles, les migrants sont presque certainement condamnés à mort. Il faut donc garder ce fait à l’esprit : les ONG ne jouent qu’un rôle minoritaire dans le secours en mer en Méditerranée centrale.
Rapport publié par la Fondation Patriotes pour l’Europe