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Élections fédérales allemandes: comment comprendre la montée de l'AfD?
Tous les jeudis matin, retrouvez Raphael Audouard, le directeur de la Patriots for Europe Foundation, dans la matinale de Radio Courtoisie, Ligne Droite et ci-dessous, le replay.
Les résultats des élections fédérales allemandes avec la perçée des patriotes et la polarisation politique était le sujet de la chronique du jeudi 27 février.
Pendant longtemps, l’Allemagne était dominée par deux grands partis traditionnels : le SPD (Parti social-démocrate, équivalent du Parti Socialiste en France), à gauche, et la CDU (Union Chrétienne-Démocrate, équivalent de Les Républicains en France), à droite. Contrairement à d’autres pays européens qui ont vu l’essor de partis contestataires, l’Allemagne semblait préserver une certaine stabilité politique. Toutefois, la chute du gouvernement de coalition entre la gauche et le centre a provoqué une radicalisation du débat politique.
L’émergence de partis qualifiés de « populistes » a modifié la donne. L’AfD (Alternative für Deutschland), un parti national-conservateur, a enregistré une forte progression, tandis que le BSW (Bündnis Sahra Wagenknecht), issu de la gauche radicale Die Linke mais critique de l’immigration, a également gagné du terrain. La campagne électorale s’est ainsi structurée autour d’un clivage entre les partis traditionnels et ces nouvelles forces politiques, avec un thème central : l’immigration.
Une percée de la droite et des partis contestataires
Les résultats de ces élections marquent un tournant dans la vie politique allemande. La coalition conservatrice CDU-CSU a remporté 28,5 % des voix, confirmant sa position dominante. Cependant, la principale surprise vient de l’AfD, qui a réalisé un score historique de plus de 20 %, une première pour un parti patriote en Allemagne depuis plusieurs décennies.
En revanche, la gauche sociale-démocrate et écologiste a enregistré un net recul : le SPD n’a obtenu que 16 % des voix et les Verts 11 %, un échec pour ces deux formations qui étaient précédemment au pouvoir. Dans le même temps, la gauche radicale a progressé, illustrant la polarisation croissante du pays. Die Linke, un parti de gauche pro-immigration (équivalent de La France Insoumise en France), a recueilli 9 % des suffrages, tandis que le BSW, critique sur cette question, a atteint près de 5 %. Enfin, le centre libéral FDP (Parti libéral-démocrate) s’est effondré à 4 %, disparaissant du Bundestag (Parlement).
Une fracture géographique marquante a également été mise en lumière. Alors que l’Allemagne de l’Ouest a majoritairement voté pour les partis traditionnels, l’Allemagne de l’Est a plébiscité l’AfD et la gauche radicale (Die Linke et le BSW), atteignant parfois 35 % pour l’AfD et près de 20 % pour la gauche radicale.
Une nouvelle configuration plus polarisée
Ces élections marquent la fin du consensus politique allemand. La domination des partis classiques cède la place à une nouvelle configuration plus polarisée. Outre l’émergence de partis radicaux, les formations traditionnelles elles-mêmes ont adopté un discours plus tranché. La CDU a notamment remporté les élections en durcissant sa position sur l’immigration, rompant avec l’héritage d’Angela Merkel. Le SPD et le FDP ont également adopté des discours plus critiques sur cette question, ce qui témoigne d’une évolution de l’ensemble du spectre politique allemand.
Jusqu’à récemment, le discours dominant en Allemagne présentait l’immigration comme une opportunité économique et sociale. Toutefois, l’AfD est parvenue à imposer ce sujet dans le débat public, forçant même ses adversaires à se positionner sur cette question. Bien qu’Alice Weidel, leader de l’AfD, n’intègre pas le gouvernement, son influence sur l’agenda politique est indéniable.
Un tournant politique majeur
Le nouveau gouvernement devrait résulter d’une coalition entre la CDU et le SPD, perpétuant un gouvernement centriste : la « grande coalition ». Toutefois, cette coalition risque d’être tiraillée entre ses différentes sensibilités internes, notamment sur la question de l’immigration.
Par ailleurs, la société allemande est de plus en plus polarisée. L’Allemagne de l’Est semble devenir un bastion des partis contestataires, tandis que l’Ouest reste attaché aux formations traditionnelles. De nouvelles tendances émergent également : les jeunes hommes votent massivement pour l’AfD, tandis que les jeunes femmes se tournent plutôt vers Die Linke.
En conclusion, ces élections marquent un tournant politique majeur en Allemagne. La montée en puissance de l’AfD et d’autres partis contestataires suggère que cette dynamique est amenée à se poursuivre. L’avenir politique allemand semble ainsi se diriger vers un affrontement de plus en plus net entre patriotes et mondialistes.