Les gauches enfin lucides sur l'immigration et la mondialisation?

Progressisme culturel, immigration, mondialisation : la gauche européenne commence (enfin) à douter de ses dogmes. 

Ecoutez l’analyse complète de Raphaël Audouard ci-dessous: 

Ces dernières années, un phénomène discret mais significatif s’est amorcé en Europe : la montée de courants de gauche critiques de la mondialisation, du progressisme culturel et parfois même de l’immigration. En Europe du Nord, le cas du Danemark est emblématique : les sociaux-démocrates au pouvoir ont adopté une ligne très ferme sur l’immigration, remettant en cause les dogmes traditionnels de la gauche progressiste. Même tendance en Slovaquie, où le gouvernement social-démocrate affiche une hostilité marquée envers les politiques migratoires de Bruxelles. En Allemagne, l’émergence du parti de gauche radicale fondé par Sahra Wagenknecht, critique de l’immigration et des excès du wokisme, marque une rupture avec les anciennes lignes de Die Linke, le parti de gauche radicale. En Grèce, le parti de Zoé Konstantopoulou, Cap sur la liberté, issu d’une scission de Syriza, le parti de gauche radicale, atteint désormais 15 % dans les sondages. Son programme combine souverainisme, critique de la mondialisation et défense des classes populaires. Ces exemples indiquent que, sans encore constituer une force politique dominante, une gauche patriote émerge bel et bien en Europe.

chronique les gauches patriotes

Une pluralité de gauches patriotes

Il serait erroné de considérer cette gauche patriote comme un mouvement unifié. Elle se compose en réalité de plusieurs courants. Dans les pays nordiques et d’Europe centrale, certains partis sociaux-démocrates ont évolué pour suivre leur électorat populaire, inquiet des effets de la mondialisation et de l’immigration. Le modèle danois inspire même des débats internes en Suède, en Norvège ou en Finlande. En parallèle, des partis issus de la gauche radicale, comme celui de Sahra Wagenknecht en Allemagne ou de Zoé Konstantopoulou en Grèce, défendent une ligne souverainiste, anti-progressiste et attachée à la justice sociale. Parfois, même des partis écologistes prennent des positions critiques vis-à-vis de Bruxelles et de l’immigration, notamment en Europe de l’Est (ex. : l’Union lituanienne agraire et des verts). Ce phénomène reflète des réalités culturelles et sociologiques différentes. En Europe de l’Est, le clivage gauche-droite reste d’abord économique, et nombre de partis de gauche sont restés culturellement conservateurs. À l’Ouest, certains partis revoient leur logiciel pour reconquérir un électorat populaire en voie de droitisation.

 

Vers un nouveau clivage politique en Europe ?

Cette évolution n’est pas sans conséquences. Elle reflète un réalignement profond des sociétés européennes. Le clivage traditionnel gauche/droite cède de plus en plus la place à une opposition entre mondialistes et patriotes. La sociologie électorale s’est transformée : les classes populaires et les classes moyennes inférieures, jadis bastions de la gauche, se tournent aujourd’hui vers des formations patriotes. Face à cette mutation, certains partis de gauche adaptent leur discours pour ne pas perdre ce socle électoral, à l’instar du Danemark. D’autres, comme La France Insoumise, adoptent une stratégie inverse, misant sur un électorat plus jeune, urbain et issu de l’immigration, ce qui limite fortement toute remise en question de l’idéologie migratoire ou multiculturaliste. À court terme, cette émergence d’une gauche patriote peut concurrencer la droite nationale – comme au Danemark où elle a marginalisé le Parti du peuple danois. Mais elle peut aussi ouvrir la voie à des convergences stratégiques, comme on l’a vu en Italie avec l’alliance ponctuelle entre Matteo Salvini (Ligue du Nord) et le Mouvement 5 Étoiles, parti plutôt de gauche patriote. À long terme, l’existence de gauches patriotes pourrait normaliser un discours souverainiste, réduire la stigmatisation du patriotisme, et contribuer à recentrer les débats européens autour des enjeux fondamentaux de souveraineté, d’identité et de justice sociale. Une recomposition politique est en marche. L’Europe de demain pourrait bien être structurée, non plus autour de la droite et de la gauche, mais autour d’un affrontement entre mondialistes et patriotes.

 

Copyright © 2025. Tous droits réservés Fondation Patriots for Europe.
La Fondation Patriotes pour l’Europe est partiellement financée par le Parlement européen et est seule responsable de ce contenu.