Elections en Roumanie : la démocratie bafouée

La Commission électorale vient de rejetter la candidature de Calin Georgescu à la présidentielle de mai, sans justifier sa décision.Après l’annulation du premier tour en décembre, voilà que la démocratie en Roumanie est une nouvelle fois piétinée. Calin Georgescu, sous contrôle judiciaire et interdit de médias, devient le symbole d’une liberté d’expression bafouée. L’ingérence n’est pas russe, elle est bruxelloise. 

Ecoutez l’analyse complète de Raphaël Audouard ci-dessous: 

La semaine dernière, on a assisté à l’arrestation de Georgescu, un candidat nationaliste en tête des sondages, qui a ensuite été inculpé pour trouble à l’ordre constitutionnel, trouble à l’ordre public et fausses déclarations concernant les sources de financement des campagnes électorales. En plus de cette inculpation, il est interdit d’apparaître dans les médias pendant 60 jours et 47 perquisitions ont été menées chez certains de ses partisans. Symboliquement, Georgescu a été arrêté alors qu’il se rendait pour déposer sa candidature à l’élection présidentielle, plongeant ainsi le pays dans une crise politique majeure.

Qui est Călin Georgescu ?

Georgescu est un candidat nationaliste qui a autrefois appartenu à l’Alliance pour l’Unité des Roumains (AUR), un parti qu’il a quitté il y a quelques années. Son profil est atypique : ses propos souvent chocs et sa présence sur TikTok, où il se met en scène dans des activités sportives comme le judo et la natation, rappellent la stratégie de communication de Vladimir Poutine, qu’il admire.

 

Au-delà des polémiques, il se présente avant tout comme un candidat patriote et conservateur, défenseur des valeurs orthodoxes et de la souveraineté roumaine. Sur le plan économique, il préconise une nationalisation partielle de l’économie et la protection des services publics. Son positionnement anti-système et anti-corruption lui vaut le soutien de partis nationalistes et de certaines formations de gauche, notamment le Parti socialiste roumain. Face à une grande coalition entre le Parti national-libéral et le Parti social-démocrate, accusée de corruption, Georgescu apparaît comme une alternative radicale.

Les médias occidentaux le présentent comme un candidat pro-russe

Il est vrai que Georgescu admire Poutine, critique le soutien de la Roumanie à l’Ukraine et remet en question certaines positions de l’OTAN. Toutefois, il ne préconise pas une sortie du bloc occidental. Admirateur de Donald Trump, il a reçu le soutien de JD Vance lors du sommet de Munich. Son objectif est d’assouplir la position de la Roumanie sur la Russie, notamment pour préserver son économie. Son positionnement rappelle davantage celui de Viktor Orbán que celui d’un agent du Kremlin.

Une crise politique majeure en Roumanie

La Roumanie est en proie à une crise politique depuis l’annulation du second tour de l’élection présidentielle de novembre dernier. Georgescu, initialement outsider, avait créé la surprise en arrivant en tête avec plus de 20 % des voix, alors que les sondages lui en attribuaient deux fois moins. Face à une candidate libérale peu soutenue, il était pressenti pour remporter le second tour. Cependant, quelques jours avant celui-ci, la Cour constitutionnelle a annulé l’élection, prétextant une ingérence russe via TikTok. Cette intervention a suscité un tollé, renforçant la popularité de Georgescu, qui est depuis le grand favori du scrutin de mai 2025.

 

Les raisons de cette annulation

Officiellement, la Cour constitutionnelle a justifié sa décision par une ingérence russe. Cependant, beaucoup y voient une manœuvre politique. Avant l’élection, une candidate ouvertement pro-russe avait déjà été empêchée de se présenter sous prétexte qu’elle remettait en question l’adhésion de la Roumanie à l’UE et à l’OTAN, jugée contraire à la Constitution. Cette politisation de la Cour a été critiquée y compris par certains responsables des partis au pouvoir.

Par ailleurs, l’interdiction de médias imposée à Georgescu pendant 60 jours, soit la durée totale de la campagne, constitue un grave précédent pour la liberté d’expression. L’Union européenne, en soutenant cette mesure, affaiblit la démocratie roumaine.

L’Union européenne et son passé de contestation des élections

Ce n’est pas la première fois que l’UE refuse un résultat électoral. En 2005, le « non » français et néerlandais au traité constitutionnel européen a été contourné par le traité de Lisbonne. Plus récemment, l’UE a contesté des élections en Géorgie et en Serbie, tout en ignorant des irrégularités lorsque les candidats pro-européens sont vainqueurs, comme en Moldavie.

JD Vance a critiqué cette stratégie lors de son discours à Munich, dénonçant l’utilisation de l’argument « pro-russe » pour discréditer les candidatures patriotes. L’UE risque de provoquer l’effet inverse en marginalisant des leaders qui, bien que critiques, restent attachés au bloc occidental.

Une stratégie contre-productive

En assimilant tout discours patriote à du pro-russisme, l’UE force ces mouvements à se radicaliser. La plupart de ces partis souhaitent simplement des relations diplomatiques normalisées avec Moscou, sans quitter le bloc occidental. En refusant d’accepter ces spécificités locales, Bruxelles les pousse à se rapprocher de la Russie.

Georgescu, martyr du système ?

Malgré l’interdiction médiatique, Georgescu progresse dans les sondages, atteignant entre 35 et 40 %. Son arrestation et l’annulation du scrutin renforcent son image d’opposant persécuté. En Roumanie, mais aussi ailleurs en Europe de l’Est, ces ingérences occidentales sont perçues comme du mépris, alimentant un rejet croissant des élites européennes.

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