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Au nom de l’« urgence écologique », Bruxelles sacrifie les libertés

Rodolphe Cart
Rodolphe Cart est journaliste à Éléments et contributeur aux revues Front Populaire et Omerta. Il est l’auteur de plusieurs essais dont Georges Sorel, le révolutionnaire conservateur (La Nouvelle Éditions, 2023), ou Faire Légion, Pour un réveil des Autochtones (Éditions Hétairie, 2024).
Sous prétexte d’urgence climatique, l’Union européenne impose une transition brutale, liberticide et profondément antisociale.
Interdiction des moteurs thermiques, ZFE, normes énergétiques absurdes : la facture écologique est d’abord payée par les classes moyennes et les territoires périphériques. Partout en Europe, les populations subissent, mais certains gouvernements, comme en Italie ou en Hongrie, choisissent de résister.
L’idéal de la transition écologique pousse nos dirigeants dans une course effrénée vers la « réglementation magique » — sans tenir des enjeux économiques, sociaux et même environnementaux qui en découlent. Pensées et mises en œuvre par des élites technocratiques déconnectées, ces mesures sont perçues par une part croissante de la population comme une atteinte directe à leurs libertés et à leur mode de vie. Si la problématique écologique est légitime, il n’y a peut-être aucune question aujourd’hui aussi mal posée. Trois mesures symboliques — la fin du moteur thermique, les ZFE et le DPE — illustrent cette dérive.
Fin du moteur thermique : un sabotage industriel européen
En février 2025, les députés français, notamment grâce aux députés du Rassemblement National, ont refusé d’inscrire dans le droit national la date européenne de 2035 pour l’interdiction de la vente de voitures thermiques neuves, qui doit remplacer l’échéance de 2040 actée jusqu’ici par la France.
L’Italie de Meloni, l’Allemagne, la Pologne, la Hongrie, la République tchèque, la Slovaquie et le Portugal ont aussi exprimé leur rejet de ce calendrier imposé par Bruxelles.
Une telle mesure serait une catastrophe économique pour l’industrie européenne : constructeurs, équipementiers, (en particulier en France et en Allemagne), avec près d’un million d’emplois menacés. Elle ouvrirait un boulevard aux constructeurs chinois, bien plus avancés sur l’électrique, au moins 10 ans. Délocalisations, perte de compétitivité, inflation : le cocktail est explosif.
Sur le plan écologique, l’argument est trompeur. Le moteur thermique peut à moyen terme atteindre un bilan carbone comparable à l’électrique, notamment grâce aux carburants synthétiques. Certains constructeurs, comme Renault, assurent que le moteur thermique pourrait d’ici une vingtaine d’années avoir un même bilan carbone que l’électrique, du fait de la recherche-développement et des carburants propres.
Aussi, la fourniture de batteries en grand nombre impose d’importants saccages écologiques délocalisés dans plusieurs pays en développement : l’extraction du cobalt, du lithium, et du nickel – si importants pour les batteries – est une des industries les plus polluantes au monde. Le recyclage des batteries est limité (46 % de batteries collectées). Par ailleurs, les voitures électriques sont difficilement réparables et peu recyclables sans parler de la revente, le marché de l’occasion électrique étant au point mort car il n’est pas possible de connaitre l’état de la batterie.
Enfin, mettre fin aux moteurs thermiques revient à condamner une partie de la population à une mobilité réduite. L’utilisation des véhicules électriques n’est absolument pas adaptée à nos territoires ruraux en matière d’autonomie de batterie, de distance à parcourir et de matériel de recharge.
Là où la France applique avec zèle les directives bruxelloises les plus dures, d’autres pays européens opposent une résistance de plus en plus ouverte à l’écologisme liberticide. L’Italie, par la voix de Giorgia Meloni, a dénoncé un risque de « désertification industrielle » et souhaite « corriger » l’interdiction de la vente de voitures thermiques dès 2035, la jugeant « absurde » et économiquement dangereuse. La Hongrie, quant à elle, conteste l’approche dogmatique de Bruxelles et plaide pour la préservation de son autonomie énergétique. Quant à l’Allemagne, l’élève modèle, propose un carburant de synthèse. « On utilise du CO2 et de l’hydrogène. Ces carburants sont une solution neutre au CO2 car le gaz est puisé dans l’air ambiant », explique Roland Dittmeyer, directeur Institut for Micro Process Engineering Karlsruhe (Allemagne).
La fracture se creuse entre une Europe qui applique et une autre qui interroge.

ZFE : la liberté de se déplacer menacée
Restons dans le domaine de la voiture. Les zones à faibles émissions (ZFE), soutenues par l’UE, visent à interdire les véhicules les plus anciens dans les grandes agglomérations pour répondre aux normes européennes de qualité de l’air. Leur généralisation devait s’intensifier en 2025.
Mais en France, un tournant politique a eu lieu. D’abord freinée en mai 2025 par une alliance RN-UDR à l’Assemblée nationale, l’extension des ZFE a ensuite fait l’objet d’un vote d’abrogation en juin 2025. Ce vote marque un signal fort, bien qu’il ne soit pas encore définitif : le texte doit encore être examiné par le Sénat et pourrait être contesté. Cette remise en cause témoigne d’un rejet croissant de l’agenda bruxellois, accusé de sacrifier les libertés individuelles au nom d’un écologisme coercitif.
Mais ailleurs, elles progressent : 300 ZFE sont déjà déployées en Allemagne, en Italie, en Espagne, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. Ces zones vont continuer à se multiplier, de même que les véhicules interdits, transformant les ZFE en zones de forte exclusion.
Conséquence : des millions d’Européens vont devoir changer de voiture s’ils veulent continuer à circuler. La voiture, symbole de liberté et d’autonomie des classes moyennes et populaires, devient un luxe. Les aides sont insuffisantes. Selon une mission conduite par l’Assemblée nationale sur les ZFE, « le reste à charge moyen des ménages et des entreprises bénéficiant de ces aides demeure supérieur à 20.000 euros et atteint jusqu’à 40.500 euros en moyenne pour l’achat d’un véhicule hybride rechargeable neuf ». De tels prix deviennent prohibitifs pour de plus en plus d’Européens en voie de déclassement à cause de l’inflation — sans parler du prix du kilowattheure, qui ne cesse de grimper.
Les ZFE accentuent la fracture entre les métropoles, converties à l’idéologie verte, et les zones périphériques ou rurales.
Pour le sondeur Jérôme Fourquet, c’est l’opposition entre les « oasis écologiques » et la « France de l’arrière-cour ». Et attention aux récalcitrants. En France, elle est de 68 euros pour les véhicules des particuliers et de 135 euros pour les poids lourds et les transports en commun. Ailleurs, l’amende grimpe avec 100 euros en Allemagne et en Grèce, 200 euros à Madrid, et plus de 350 euros à Bruxelles.
En réalité, les écologistes veulent forcer les populations à renoncer à leur liberté individuelle de déplacement — notamment en voiture — pour adopter des solutions collectives comme les transports publics ou le covoiturage, à condition qu’ils existent dans les territoires concernés. Ce collectivisme vert, fondé sur une contrainte imposée d’en haut, révèle au fond combien l’idéologie écologiste contemporaine se méfie, voire se méprend, sur la liberté individuelle.
Et ailleurs en Europe ? En Italie, malgré les réticences affichées par Rome, des villes comme Milan ou Rome poursuivent leur mise en place. En Hongrie, Budapest maintient une ZFE locale. Le peuple subit, pendant que les technocraties locales appliquent les plans de Bruxelles. Une fracture supplémentaire entre centre et périphérie, entre norme imposée et liberté niée.
DPE : une bombe sociale européenne prête à exploser
En 2024, une directive européenne impose que tous les bâtiments neufs soient à émissions nulles d’ici 2030, et que le parc ancien soit mis aux normes d’ici 2050. En France, le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) est l’instrument principal. Mais le critère pénalise artificiellement les logements chauffés à l’électricité (multiplication par 2,3 de l’énergie consommée), alors qu’ils sont moins émetteurs de CO2.
Dès 2023, les logements classés G sont interdits à la location ; les F suivront en 2028, puis les E en 2034. Cela exclut des dizaines de milliers de logements du marché, aggrave la crise locative, et ruine les petits propriétaires qui louent leurs biens et qui ne peuvent assumer des rénovations dispendieuses, provoquant une crise du logement. Sans parler de la fraude massive qui donnent lieu à des arrangements entre certains propriétaires, agences immobilières et diagnostiqueurs immobiliers. « C’est devenu un enfer, un repaire d’escrocs », témoigne un ancien diagnostiqueur.
Face à cela, certains pays réagissent. En Hongrie, le gouvernement refuse d’imposer des rénovations sans aide massive. En Slovaquie, un calendrier assoupli et des exemptions sont prévus. En Italie, le gouvernement a officiellement demandé à Bruxelles un assouplissement des objectifs, au nom de la protection du logement populaire.
Le réveil des peuples face à l’utopie verte
Rappelons une statistique : les émissions de CO2 de l’UE représentent moins de 7 % des émissions mondiales, et seulement 1 % pour la France. Pourtant, les populations européennes sont soumises à des restrictions massives.
Or, qui souhaite être « restreint » dans sa liberté de circulation, d’habitation ou de consommation ? Pour que des mesures écologiques soient bien reçues, il faut rassembler plusieurs éléments : une non-aggravation des inégalités économiques et sociales existantes ; un impact réel pour légitimer les efforts consentis ; une transition plutôt qu’une rupture brutale.
Cette politique climatique dogmatique, conçue à Bruxelles, fait peser l’effort sur les plus modestes tout en affaiblissant la souveraineté énergétique et industrielle.
Mais une résistance européenne émerge. L’Italie de Meloni, la Hongrie de Viktor Orbán, mais aussi d’autres pays, contestent cette vision punitive et unifiée. Ils rappellent qu’une véritable transition écologique doit être réaliste, juste, et respectueuse des libertés.
Si l’Union européenne persiste dans l’imposition uniforme de mesures socialement explosives, elle s’expose à un retour de bâton politique massif : celui des peuples qui refusent de payer seuls le prix de l’utopie verte.